La Tshopo en Apnée Administrative : Comment le VPM Jacquemain Shabani gèle l’Exécutif et gère le risque de crise Institutionnelle

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C’est une pause glaciale, une trêve administrative forcée. Au milieu de la tempête politique qui a déferlé sur la Tshopo avec la destitution de Paulin Lendongolia, le Vice-Premier Ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, a tranché. Pas de chaos, pas de vacances, mais un intérim de fer confié au Vice-Gouverneur Didier Lomoyo. Kinshasa a brandi le drapeau de la stabilité, transformant la province en une salle d’attente où le destin du pouvoir dépend désormais du seul juge. Le drame n’est pas terminé, il est mis en sursis sous haute surveillance.

La déchéance d’un Gouverneur ne crée jamais un vide propre ; elle laisse derrière elle une marge d’incertitude que les opportunistes s’empressent de traverser. C’est ce risque d’anarchie administrative et de confusion du commandement que le VPM Jacquemain Shabani a cherché à éteindre avec une rapidité d’exécution louable.

Le geste est un acte de tutelle fort et nécessaire. En nommant formellement Didier Lomoyo à l’intérim, Shabani ne fait pas que respecter l’ordre protocolaire (le Vice-Gouverneur succède au Gouverneur empêché) : il envoie un signal clair à la classe politique locale.

“Le gouvernement central refuse catégoriquement le blocage administratif. L’argent public, la sécurité des citoyens, la gestion courante… rien ne doit souffrir des querelles des élites. C’est une mise sous tutelle de facto de l’exécutif provincial, dont l’unique mission est de faire fonctionner la machine, sans ambition ni audace, jusqu’à nouvel ordre”.

L’aspect le plus succulent de cette décision réside dans sa limite temporelle. L’intérim n’est pas indéfini ; il est borné par le recours de Paulin Lendongolia en cours. Cette formulation est cruciale. Elle signifie que le gouvernement central, bien qu’informé de la déchéance, ne la considère pas comme un fait politique accompli tant que la justice n’a pas statué sur sa légalité.

L’ancien Gouverneur conteste la procédure de sa déchéance (un vote à l’Assemblée Provinciale) devant une juridiction supérieure, espérant une annulation pour vice de forme. En liant l’intérim à cette “décision de justice”, le VPM se pose en arbitre suprême, déléguant la sentence finale au pouvoir judiciaire. C’est à la fois une preuve de respect des institutions et un moyen habile d’éviter de se mouiller dans une crise potentiellement réversible.

C’est une reconnaissance pour l’Assemblée Provinciale de la Tshopo. Mais bien qu’elle ait voté la déchéance, son acte reste suspendu au bon vouloir du juge. Le pouvoir est au milieu du gué.

Pour Didier Lomoyo, la tâche est ingrate, mais capitale. Il est le gardien du temple, non l’héritier couronné. Sa mission se résume à une haute voltige administrative. Gestion des crises (sans initiative) : Il doit régler les problèmes urgents (le paiement des salaires des agents provinciaux, sujet sensible, sans engager la province sur des projets à long terme ou des dépenses importantes.

Il doit naviguer à travers les factions, se montrant loyal à l’État, mais sans froisser l’Assemblée Provinciale ni l’ancien Gouverneur (dont le retour, bien que peu probable, reste juridiquement possible).

Chaque décision de Lomoyo sera scrutée, non seulement par l’Assemblée qui l’a laissé en place, mais aussi par les partisans de Lendongolia qui chercheront la moindre faille pour appuyer leur recours.

C’est une gouvernance de l’attente, où la prudence doit primer sur l’ambition.Le sort de la Tshopo est désormais suspendu aux arcanes de la justice. Si le recours de Paulin Lendongolia est rejeté, l’intérim de Lomoyo prendra fin, et le processus d’élection d’un nouveau Gouverneur pourra être enclenché. Si, par un coup de théâtre judiciaire, le recours était jugé recevable et fondé, on assisterait à la restauration de l’ancien Gouverneur, un scénario rare et explosif.

Quoi qu’il arrive, l’instruction de Jacquemain Shabani a réussi à imposer l’ordre. Elle a transformé une crise potentielle en une simple parenthèse administrative.Le silence est revenu à Kisangani. Mais il n’est pas la paix ; il est la tension palpable de la corde de l’arc tendu, attendant que la flèche du jugement soit enfin décochée.

Jerry Lombo


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